Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

DIMANCHE 06 FÉVRIER 2011

Trescléoux (05700).

Lectures du Jour

Esaïe 58, 7-10

1 Corinthiens 2, 1-5

Matthieu 5, 13-16

Notre mission

Introduction

Frères et sœurs, nous voici devant un autre monument du nouveau testament, le sermon sur la montagne, dès le 5° chapitre de cet évangile de Matthieu, placé en première place dans le NT, ce « sermon » s’étalant sur deux chapitres.

Ce sermon contient déjà tout l’enseignement de JC, avec en particulier la règle d’or du chapitre 7 et ce qu’on peut appeler le principe de réciprocité, qui sous-tend tout l’enseignement de Jésus

Notre lecture de ce matin nous propose 2 petites paraboles complémentaires, en 3 versets : celle du sel insiste plus sur l’aspect communautaire, celle de la lumière, plus sur l’humanité, la relation à l’autre ;

Mais toutes les deux commencent par « Vous êtes », non pas par vous avez, vous serez, non, « vous êtes ». Je ne sais pas si je vous apprends quelque chose de nouveau, si c’est un scoop, mais vous êtes, nous sommes, le sel de la terre, la lumière du monde !!!

Bigre !!

Le jour où nous avons confessé devant notre communauté « Oui, Jésus Christ est mon Seigneur », pensions-nous que nous nous engagions de la sorte ?

Eh bien c’est trop tard, vous êtes, nous sommes…

Mais nous sommes quoi, au juste ?

Le sel

Curieuse matière que le sel, cet ingrédient qui permit durant des siècles de conserver les aliments, symbole de l’Alliance durable entre Dieu et le peuple Juif « ne laisse pas ton offrande manquer du sel de l'alliance de ton Dieu… ».

Jésus, en proclamant à ceux qui l’écoutent et qui le suivront qu’ils sont le sel de la terre, annonce la nouvelle alliance proposée par Dieu, mais cette fois à toute l’Humanité. Les chrétiens sont bien le sel de la terre, travaillant à la préservation d'un monde issu du projet de Dieu, monde avec lequel Dieu scelle une nouvelle alliance, en Jésus-Christ, alliance dont nous sommes aujourd’hui les seuls signes visibles. Nous, son Eglise, le sel purificateur.

Et j’en viens à une autre particularité du sel : la saveur, le goût. Il n’en faut pas forcément beaucoup : Regardez ce pain que nous allons partager tout à l’heure : 20 g de sel pour 1Kg de farine : 2%, trois fois rien, comme aurait dit Raymond Devos, et pourtant, mangez vous volontiers du pain sans sel ?

Dans ces 20 g. de sel ; combien de grains, même avec du gros sel ? Et où sont-ils ? Disparus ? Mangez en un morceau et vous constaterez qu’ils sont bien là, définitivement là, individuellement invisibles mais collectivement présents : voilà notre Eglise : chaque grain a besoin de tous les autres, notre unité elle est là, nous fondre avec tous nos frères petits grains pour accomplir notre mission commune, la mission que JC nous a confiée : Etre le sel de la terre.

Mais nous devons faire quelques remarques à ce propos :

- Tout d’abord un grain de sel ne peut saler qu’un fois, alors si nous voulons dans la durée pouvoir continuer de donner du goût à l’Humanité, le goût de la vraie vie, le goût de vivre en harmonie avec son créateur, nous devons nous reconstituer auprès de la source unique, JC, notre Seigneur, c’est le sens de ce repas partagé, où nous concrétisons à la fois que nous sommes une communauté et que noua avons besoin de la présence quotidienne de JC à nous côtés, comme il nous l’a promis.

-Ensuite trop de sel rend le plat immangeable, alors prenons garde. Par le passé et encore aujourd’hui, les chrétiens, par leur comportement, leur arrogance disent certains, leurs actions, pour ne pas dire leurs exactions, ont rendu le message de JC immangeable, inaudible, inacceptable. Alors, veillons et prions sans cesse pour que JC nous donne cette exigence d’humilité et relisons aussi sans cesse ces 8 béatitudes « Heureux celui qui… » Qui inaugurent ce sermon sur la montagne, surtout nous les huguenots, ces 8 béatitudes que nous portons sur nous à travers les 8 boules aux extrémités de notre croix.

La lumière du monde

Et la lumière alors ?

En préparant cette méditation, une expression m’est venue : « la nuit tous les chats sont gris ».

6 milliard d’hommes sur la terre, tous les mêmes, vous pouvez vérifier, une masse uniforme : « les masses populaires », disait Marchais, vous n’étiez plus que des nombres, chantait Ferrat dans cette chanson qui colle si bien à notre propos de ce matin : « Nuit et brouillard ».

Dans l’obscurité de ce monde déréglé, les hommes deviennent de plus en plus des masses, des nombres.

Et la lumière arrive : De cette masse émerge un visage, un autre, un autre encore, tous différents, tous uniques : Voilà ce que fait la lumière : révéler à chaque homme et femme, cette irréductible différence qui fait de lui ou d’elle un être unique, que l’on reconnaît, et il ne faut pas se tromper de sens sur ce mot. Je te reconnais, je sais qui tu es, je t’accepte tel que tu es, je reconnais ton altérité, ton « irréductible différence ». 6 milliard d’hommes et de femmes à qui l’on peut dire :

Tu es un être unique, qui vaut le coup, d’où que tu viennes, quelle que soit ton histoire. Jésus s’intéresse à toi, comme à la brebis perdue. Rappelez-vous ce qu’il disait : « Il y a plus de joie dans le Ciel pour une brebis retrouvée que pour les 99 autres restées bien sagement dans la bergerie ».

Je repense aussi à ces jeunes compagnons de la Croix Bleue qui dans l’entre deux guerres passaient leurs samedis soirs à sillonner les rues sombres des banlieues ouvrières relevant du caniveau des hommes ivres tombés au plus bas de l’humanité, dont la déchéance en disait souvent long sur l’itinéraire tragique de leur vie, qui était souvent passé par la guerre de 14-18. Ils les relevaient, au propre comme au figuré, et une fois debout, le visage de l’homme s’éclairait à la lueur blafarde du bec de gaz. Alors, la forme incertaine redevenait un homme, une créature de Dieu qui pouvait renaître, naître de nouveau, au sein d’une nouvelle famille.

Voilà, la mission de la « lumière du monde » que nous sommes, imprégnés de l’exemple de notre Seigneur, tombé lui aussi au plus bas de l’humanité, la croix infâmante, c’était son caniveau, mais lui en a triomphé par la puissance divine, nous ouvrant ainsi le chemin vers le Père, notre créateur.

Alors là aussi quelques remarques, les mêmes que pour le sel :

- La lumière peut aussi éblouir et conduire les hommes à se réfugier dans l’obscurité retrouvée, alors sachons suivre l’exemple de Paul, qui nous est donné ce matin.

- La lampe ne s’éclaire pas elle-même, elle éclaire au dehors d’elle-même : c’est une remarque à méditer par nos églises, qui pleurent sur leur dépérissement mais cultivent souvent l’entre-soi, oubliant d’aller éclairer les créatures de Dieu dans le caniveau, la boue, la où plus personne ne va les chercher.

- Si la lumière éclaire, elle instruit également, ne dit-on pas à quelqu’un qui vous a donné une bonne explication « vous m’avez éclairé, vous m’avez apporté vos lumières » ?

Cette dernière remarque me permet de faire une transition vers ce qui sera ma conclusion :

L’Eglise

Je voudrais en effet vous lire la toute fin de ce sermon sur la montagne, le dernier verset du chapitre 7 :

« Après que Jésus eut achevé ces discours, la foule fut frappée de sa doctrine; son enseignement, car il enseignait comme ayant autorité, puissance, et non pas comme leurs scribes ».

Jésus était totalement investi dans son ministère, c’est cela qui donnait autorité à son enseignement. J’ai regardé cette semaine un documentaire sur MLK, et il était frappant de voir comment il était investi de sa mission, au point que cela lui faisait parfois peur, au point qu’il avait la prémonition de la façon dont cela allait se terminer, mais il continuait d’avancer et son autorité força le respect des présidents Kennedy ou Johnson.

Etre investi de notre mission. C’est ce verbe être qui est important, ce petit auxiliaire auquel plus personne ne prête attention.

Or la particularité d’un être, vous, moi, c’est qu’il est. C’est d’ailleurs ainsi que Dieu se définit lui-même à Moïse.

Ce que Jésus nous propose c’est de nous vider de tous les vernis qui ont recouvert notre être profond depuis notre naissance pour entrer en communion avec Lui, faire réapparaître celui ou celle que nous sommes vraiment, en tant que frères de Christ. Et ce que nous sommes « sel et lumière ».

Cette lumière est attendue par le monde. Le message de Notre Eglise il est pour le monde, sa mission, c’est d’être dans le monde. Relisons la prière sacerdotale : « Père je ne te demande pas de les retirer du monde ».

Alors ne prenons pas, nous, l’initiative de nous retirer du monde dans le confort de nos temples.

Autour de nous tant de gens, de tous milieux sociaux, aspirent à connaître le Christ, ou auraient tant besoin de le découvrir. Quelle sera notre qualité de présence auprès d'eux ?

Soyons lumière pour les autres, plus encore que parole, tenons-nous près d'eux, laissons nous comme MLK envahir totalement par la présence de JC, car ceux que la lumière environne sont transfigurés par elle, ceux qu'elle touche, elle les relève d'entre les morts, car la Lumière, c’est JC lui-même :

Rappelons-nous Jean 3/16, mais aussi 3/19 « la lumière étant venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises »

Alors n’oublions pas cette mise en garde de JC :

« Si le sel perd sa saveur, il n'est plus bon qu'à être jeté dehors et foulé aux pieds.

Le meilleur moyen de ne pas être piétiné, c’est de rester debout, et nous avons des motifs sérieux de nous redresser, forts et joyeux de cette promesse, car cette affirmation « Vous êtes le sel de la terre, et la lumière du monde », c’est une responsabilité, soit, mais c’est d’abord une promesse de Notre Seigneur, une bénédiction, la confirmation qu’il nous considère déjà comme ses frères, sans qu’il y ait eu une quelconque négociation préalable, simplement justifiés par notre foi, et si nous sommes déjà ses frères c’est que nous sommes déjà avec lui dans la vie éternelle. Et c’est bien pour cela qu’il nous parle au présent : « Vous êtes », « celui qui… il a »

Alors frères et sœurs, le chantier est ouvert :

Dieu ne peut agir vraiment dans ce monde qu’à travers son Eglise. Soyons Eglise visible dans ce monde, dans notre voisinage et notre cité, dans la vie sociale et politique, par nos engagements et notre service désintéressé, faisons partager à nos prochains la grâce que nous avons reçue.

Alors, les hommes glorifieront- notre Père qui est dans les cieux !

Amen !

François PUJOL

1 - “Je suis la lumière”,

A dit le Seigneur ;

Avec moi, mon frère,

Ouvre-lui ton cœur.

Le monde est plein d'ombre ;

Brillons, brillons bien,

Toi dans ton coin sombre

Et moi dans le mien.

2 - Si la pure flamme

Parfois baisse un peu,

Veillons sur notre âme,

Ravivons le feu.

3 - Quand le jour se voile

Au clair firmament,

La plus humble étoile

Brille doucement.