Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

Dimanche 05 DÉCEMBRE 2010

Culte à Trescléoux (05700)

Lectures du Jour :

Esaïe 11, 1-10 (Voir également sous cette référence, méditation du 04 Décembre 2016)

Romains 15, 4-9

Matthieu 3, 1-12.

Repentez-vous !!

Repentez-vous, race de vipère !!

JB n’y va pas de main morte. Mais il ne dit pas cela à n’importe qui ! Nous retrouvons nos saducéens et nos pharisiens (que nous avons déjà rencontrés) qui viennent au bord du Jourdain voir ce JB dont on leur parle depuis quelque temps.

Alors pourquoi sont-ils là et pourquoi se prennent-ils cette invective en pleine figure ?

Ils sont là pour vérifier si à tout hasard JB ne serait pas Élie lui-même qui reviendrait, puisque son retour était annoncé, Élie le grand prophète, figure annonciatrice du messie, ouvrier du retour à la fidélité à YWHW après plusieurs règnes de rois infidèles, capable de ressusciter les morts mais aussi d’annoncer au roi infidèle (Achab et Jézabel, la vigne de Naboth) une mort terrible, de multiplier les pains quand il est recueilli par la veuve de Sarepta, capable aussi de séjourner au désert, d’y prier pendant 3 ans pour faire revenir la pluie, puis après avoir désigné Élisée comme son successeur, être enlevé au ciel, d’où il doit revenir ? Et ils lui disent « Dis-nous qui tu es, es-tu Élie ? »

Les pharisiens viennent aussi parce que JB commence à faire parler de lui et il ne faudrait pas, si cela arrive aux oreilles des romains que cela trouble l’ordre établi, dont les pharisiens s’accommodent très bien.

Si JB les interpelle, c’est qu’il les connaît trop bien, avec leur autosatisfaction : Moi je descends d’Abraham, donc je bénéfice de la promesse que YWHW lui a faite, et puis j’honore mon Dieu chaque matin, je lui fais des sacrifices, j’aime mes parents, je n’ai tué personne, je suis fidèle à ma femme, je peux donc entrer dans le temple la tête haute, et aller m’asseoir au premier rang, écraser les autres de mon arrogance.

Voilà l’image que les pharisiens donnaient et qui dure jusqu’à aujourd’hui, (traiter quelqu’un de pharisien, ce n’est pas vraiment lui faire un compliment) au point même que le général de Gaulle, après la guerre des 6 jours parlait « d’un peuple dominateur et sûr de lui »

Voilà ce qu’il dénonce, JB : s’autoproclamer juste au regard de la loi, en ignorant la justice du cœur.

C’est pourquoi il les appelle au repentir. Mais le repentir, c’est quoi ?

Les policiers, quand ils cuisinent un suspect, ils ne lui disent pas « repens-toi », mais « avoue, avoue que tu l’as commis, ce crime, tu verras, çà soulage et après ça ira mieux ».

Et bien justement, il n’avoue pas, même au tribunal, devant la cour d’assises, les témoins, les preuves irréfutables, l’ADN, il continue de nier, car il sait que s’il avoue, c’est la fin, le trou noir, le néant, il se condamnerait lui-même par son aveu. Alors il cherche une échappatoire, il dit « c’est un autre, j’étais hors de moi, donc c’est bien un autre qui a fait çà », ou alors, échappatoire suprême, il se pend dans sa cellule.

Non l’aveu n’a rien à voir avec le repentir ; car pour se repentir, il faut que quelque chose ait lieu : un événement déclencheur qui ne joue pas sur la peur, mais sur la confiance... En fait, on ne se repent pas à cause du passé, et des zones d’ombre plus ou moins noire qu’il contient... On se repent parce qu'on reçoit l'annonce, ou l'intime certitude, que quelque chose de nouveau est possible, que la route qu’il reste à faire n'est pas barrée par un panneau « sens interdit ».

Cela me fait penser aux commissions Vérité-Justice-Réconciliation, créées en Afrique du Sud et au Rwanda, après des périodes de violence insupportables. Comment reprendre le vivre ensemble, quand bourreaux et victimes se côtoient chaque jour ?

Alors, des commissions, où les églises ont été très présentes, ont été mises en place : les criminels avaient la certitude de l’amnistie à condition de se repentir publiquement, en présence des victimes, des crimes, viols, qu’ils avaient commis et qu’ils devaient au préalable confesser.

Cette mise sur la place publique de la vérité rendait justice aux victimes et la réconciliation pouvait s’enclencher. Cela a été quelque chose de très fort émotionnellement pour les anciens bourreaux comme pour les victimes.

C'est un peu cela qu'on vit, avec probablement une intensité moindre, quand on est chrétien et qu'on se repent devant Dieu. On se repent parce qu'on entend une promesse. Sans cette promesse, qui est une promesse d'avenir, on n'aurait pas la force, le courage, de se repentir. Cette promesse, par exemple, on la reçoit dans ces paroles d'Esaïe : "Même si les montagnes s'effondrent, même si les collines se mettent à trembler, je t'aime d'un amour éternel et je te garde toute ma miséricorde". Ce n'est pas rien !

Se convertir

Et dans la Bible, se repentir rime toujours avec se convertir. Se convertir, ce n'est pas changer de religion ou de confession ; c'est d'abord se tourner, ou se retourner... vers Dieu. Comme on fait une conversion à skis. C'est très concret, on se retourne complètement, à 180° (en évitant la chute).

Et on fait cela, on opère ce retournement, parce qu'on entend une petite voix, un appel, on le reçoit, on l'accepte...

Autant le remords, les regrets, la perspective d’un aveu peuvent paralyser, autant le repentir ou la conversion nous font bouger, nous libèrent. C'est en tout cas ce qui se passe là-bas, du côté du Jourdain, avec Jean le Baptiste... Un homme appelle... Il crie dans le désert... de la même voix que tous les prophètes qui, avant lui, ont crié... pour donner sur le présent une lumière d'avenir...

Rappelez-vous ces paroles de Jérémie en pleine déportation à Babylone : « Car moi, le Seigneur, je forme pour vous des projets de bonheur pour vous donner un avenir à espérer ».

Et les gens accourent de toutes parts...

L’attente

Les juifs qui étaient au bord du Jourdain, n’écoutaient pas une petite voix, mais celle tonitruante de JB, qui leur disait « je vous baptise d’eau pour vous amener au repentir ».

Et il voyait du monde, car il s’était placé sur le seul passage à gué du Jourdain, à Bethabara, sur la route qui reliait la Jordanie actuelle à Jéricho puis la route vers l’Égypte.

Ils étaient impressionnés par son apparence qui correspondait aux descriptions d’Élie dans le livre des Rois, et il semblait sortir du désert.

De plus il parlait comme un prophète. Or le dernier prophète dont ils avaient le témoignage, c’était Malachie, petit livre de 4 chapitres, écrit 400 ans plus tôt, et depuis plus rien.

ET toutes les paroles prononcées par JB renvoient au livre de Malachie :

Les péchés d'Israël et les jugements qui s'abattront sur lui à cause de sa désobéissance, Les promesses en cas d'obéissance, Malachie annonce Jean-Baptiste lui-même, la seconde venue du Seigneur et enfin le retour d'Élie.

Tout cela se mélange dans leurs têtes et ils voient en JB un homme libre, comme le montre son genre de vie, qui offre aux autres de vivre cette liberté. Il annonce une nouvelle libération. Comme s'il reprenait le flambeau d'un nouveau passage de la mer rouge pour sortir de l'esclavage d’Égypte. C'est cette Espérance rallumée qui fait que le repentir, la conversion, deviennent possibles.

Alors, bien sûr, c'est ambigu. La Judée, la Samarie, la Galilée, vivent sous la domination romaine : parler de Règne de Dieu, de venue du Seigneur, d’un Roi, éveiller l'Espérance d'une libération... cela s'entend forcément au niveau des hommes, au niveau politique... Car, dans le monde biblique, Dieu intervient dans le politique, il est acteur dans l'histoire.

En fait, les Juifs, attendaient le Messie, certes avec impatience, mais ils pensaient que ce Messie les conforterait, eux, dans leur univers, leurs habitudes, leurs pratiques religieuses; ils pensaient que ce roi se mettrait à leur service pour exaucer leur vœu le plus cher, faire le ménage dans le pays, bouter les romains dehors.

Mais le Baptiste vient leur dire : " C’est dans vos vies qu’il faut faire le ménage, c’est votre vie personnelle qui devra produire de bons fruits si vous voulez entrer dans le Royaume.

Dieu va vous donner un sauveur qui vous baptisera du Saint Esprit mais vous ne pourrez pas vous contenter d’attendre, d'être spectateurs vous devrez participer, vous retrousser les manches, et commencez donc par ce baptême, qui vous lavera de votre vieil homme et vous fera naître de nouveau en même temps que vous sortirez de l’eau.

L’espérance

ET Jésus s’approche pour se faire baptiser lui aussi, lui l’homme sans péché. Il veut ainsi manifester qu’il est totalement homme, frère des pécheurs qui viennent se purifier. Mais il est aussi totalement Dieu comme le manifestent l’Esprit de Dieu qui descend sur lui, et cette voix céleste qui dit « celui-ci … »

Ils sont peu nombreux, ceux qui comprirent ce que JB répétait inlassablement : je ne suis que le précurseur, celui qui vient après moi était déjà là avant moi.

Et si les juifs, déçus de ne pas avoir trouvé en Jésus le roi qu’ils attendaient, furent nombreux dans leur impatience à engager l’épreuve de force avec les romains, ce qui se terminera par d’horribles boucheries (à Massada le suicide collectif des zélotes, sur les rives de la mer morte non loin du gué où se trouvait JB, l’extermination des esséniens, la disparition des saducéens comme autorité morale et politique, la destruction du temple, un nouvel exil pour beaucoup,

En revanche, les premiers chrétiens, qui comprirent ce message de JB, et qui comprirent qui était vraiment celui qui venait se faire baptiser au milieu d’eux, s’engagèrent dans une révolution bien plus profonde, portés par cette espérance née au bord du Jourdain, renforcée au pied même de la croix et devant la pierre roulée du tombeau.

Constants dans cette espérance qui leur faisait dire chaque jour « Il est vivant », patients dans l’affliction, persévérants comme Élie dans la prière, ils virent, trois siècles plus tard, l’empereur romain Constantin 1° se convertir au christianisme; aider l’Église chrétienne à prendre son essor, établir la liberté de culte et placer le Dieu chrétien au-dessus de son rôle d'Empereur.

A votre avis, cela aurait-il été possible si Jésus n’avait pas été chaque jour à leur côté.

Conclusion

Si pour conclure on peut dire qu’avec JB c’est la fin de la première alliance, lui que les juifs prennent pour Elie de retour, lui qui menace les Pharisiens des pires sanctions comme on les trouve dans tout l’ancien testament chaque fois que le peuple se montre infidèle, c’est aussi JB qui nous fait entrer dans la nouvelle alliance, lui qui proclame « Voici l’agneau de Dieu qui ôte le péché du monde », cette nouvelle alliance, cette promesse pour toute l’humanité.

Avec Jean le Baptiste, une page se tourne et laisse la place à une page blanche...

Page blanche pour une nouvelle histoire, un nouveau testament qui commence au terme de cette période de l’avent, moment unique où Dieu s’incarne en un petit d’homme, où le divin rencontre le terrestre.

Mais cette rencontre a commencé quelques mois avant, lorsqu’au même moment l’archange Gabriel annonce à Marie et à Zacharie la venue de ces 2 enfants portés l’un par une jeune fille à peine pubère, l’autre par une femme au crépuscule de sa vie. Ainsi par ces deux grossesses, Dieu manifeste sa toute puissance, sa maîtrise de la vie et sa maîtrise du temps. Le commencement et la fin n’ont pas de sens pour l’Eternel.

Avec ces deux cousins Dieu nous donne accès à l’espérance : L’espérance retrouvée pour les juifs avec Jean-Baptiste qui renoue le lien avec le dernier des prophètes de l’ancien testament et cette promesse d’Esaïe « A celui qui croit, rien ne saurait ôter la présence de Dieu »,

Et avec Jésus, l’espérance offerte à toute l’humanité, par le sacrifice de sa personne, espérance d’une nouvelle vie, d’une nouvelle naissance, où le temps n’est plus ce temps terrestre qui nous colle à la peau, mais le temps avec Dieu, qui nous fait entrer dès aujourd’hui dans la vie éternelle.

Avec JB, nous passons de la loi du Talion au temps de la grâce.

Alors nous pouvons clamer haut et fort ce message de Noël : la grâce et la paix sont désormais avec nous.

Amen !

François PUJOL