Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

1° DIMANCHE de l’Avent (01/12/2012)

Culte à Gap (05000)

Lectures du Jour :

Ésaïe 2, 1-5 (Voir sous cette référence, méditation du 1er Décembre 2019)

Matthieu 24, 36-44

Romains 13,11-14

« Temps de l'Avent !».

Vous marquez, d'une façon ou d'une autre, les étapes du chemin qui mène progressivement à Noël. Certains peut-être ouvrent avec leurs enfants les fenêtres d'un calendrier de l'Avent, d'autres retrouvent à cette occasion la richesse du culte familial, d'autres encore se réservent plus particulièrement en cette période, pour un petit moment quotidien de prière, de méditation, de lecture de la Bible...

L'inscription du temps de l'Avent dans l'année liturgique remonte au 5ème ou au 6ème siècle. Il s'agissait alors, pour les autorités religieuses, de reprendre en main la façon dont les chrétiens se préparaient à la fête de Noël.

L'Eglise avait tenté, sous le règne de l'empereur Constantin, de récupérer cette très vieille fête du solstice d'hiver, dédiée au dieu Mithra, pour la transformer en fête de la nativité, une fête pour célébrer non plus le soleil renaissant mais la venue dans le monde de celui qui est lumière de Dieu pour les hommes.

Mais il est plus facile de supprimer une fête du calendrier que de transformer une fête païenne en fête chrétienne. Pour les chrétiens des premiers temps la fête de Pâques restait la grande fête de la foi et de l'espérance, fête de la résurrection. Probablement continuaient-ils à célébrer de manière beaucoup plus païenne la fête de Noël. Comme on l'avait toujours fait pour Mithra, Noël chrétien restait l'occasion de ripailles et d'excès en tous genres. Les Pères de l'Eglise se sont donc efforcés de rappeler la nécessité d'une préparation à l'événement de Noël, dans une perspective plus conforme à l'Evangile.

Ecoutez cet incroyable sermon; il date des années 380... Le prédicateur s'appelle Grégoire de Nazianze :

"Préparons-nous à ce jour avec une pleine joie, non pas vulgaire, mais spirituelle; ne parons pas l'entrée de nos maisons de guirlandes; ne formons pas de danses; ne décorons pas nos rues; ne nous amollissons pas en des habits moelleux et flottants; fuyons toutes ces futilités que sont l'or et les bijoux; point de festins, ni de beuveries qui finissent, je le sais bien, en luxure et en scandale; ne dressons pas pour le contentement du ventre des tables de délices; dédaignons les parfums capiteux des vins, les sorcelleries des cuisiniers; ne cherchons pas à nous surpasser les uns les autres en intempérances -par intempérances j'entends toute espèce de superflu et d'excès- tandis que d'autres souffrent de la faim et de la misère".

380 ! il y a 1600 ans !

Se préparer à ce qui advient : c'est le sens du mot « Avent » ; préparation à l'événement de Noël, et par delà Noël, à l'avènement du Christ, à la venue de son règne. Un règne que nous annonce le texte souvent relu dans le temps de l'Avent.

Jésus sort du Temple, d'où décidément, il n'y a plus rien à attendre et va s'asseoir à l'écart, sur le Mont des Oliviers. De là, il jette un regard lucide sur la ville et sur le monde, sur les hommes, sur leur histoire, leur façon de vivre, les illusions qu'ils entretiennent ou dont ils s'abreuvent...

Dans un long discours, Jésus dénonce tout espoir de salut qui s'appuierait sur les capacités humaines, et oriente la foi de ses auditeurs vers ce Dieu d'amour qui vient, qui va faire advenir un temps radicalement neuf. Jésus annonce le monde entrevu par le prophète, où les peuples, de leurs épées, forgeront des pioches et de leurs lances, des faucilles; un monde où seul le Seigneur sera reconnu grand et où tous ses fidèles vivront leur avent-ture humaine dans sa lumière.

Bien sûr l'annonce d'un jugement, du Jugement Dernier, tel que Jésus en parle ici, peut nous étonner, voire nous rebuter, nous scandaliser: deux hommes sont aux champs, l'un sera condamné et l'autre non; deux femmes vaquent à leurs activités ménagères, l'une sauvée et l'autre non.... Je ne pense pas que Jésus soit un prophète de malheur. Non ! ce que Jésus condamne, ce qui sera bel et bien jugé, c'est notre monde, ce monde-ci qui ne peut tout au mieux, que sauver un homme sur deux, une femme sur deux.

La Bonne Nouvelle annoncée, la Bonne Nouvelle à laquelle il nous faut nous préparer, c'est la fin de ce vieux monde et de ses pratiques.

Et la petite parabole que Jésus raconte nous dit que, contrairement à tous les discours apocalyptiques dont les hommes sont friands, contrairement à tous les horoscopes qui fleurissent déjà dans nos journaux et qui discernent les signes des grands événements l'année 2013, Dieu ne donne pas d'autres signes de son règne que ce Fils qui vient discrètement, secrètement. Il y a seulement ce mot d'ordre : «tenez-vous prêts ! Préparez-vous à l’événement».

Ni Jérusalem, ni César, ni Hérode, n'ont discerné l'événement de Noël; il est arrivé sans crier gare, il a surgi dans l'histoire de Joseph, de Marie, des bergers, des mages, d'Anne et de Siméon, des hommes, des femmes au coeur ouvert et disponible ; l'événement de Noël survient encore aujourd'hui pour ceux qui croient que la nuit est avancée, que le jour approche, que Noël est pour eux, qui l'attendent, qui s'y préparent.

Qu'est-ce à dire concrètement, pour chacun et pour chacune d'entre nous, en ce Temps de l'Avent ? Peut-être nous faut-il écouter le discours de Jésus, dans l'Evangile de Matthieu, jusqu'à la fin : "Venez, vous les bénis de mon Père : j'ai eu faim, vous m'avez donné à manger; j'étais étranger, vous m'avez accueilli; j'étais nu, vous m'avez vêtu; malade, vous m'avez visité".

L'Avent, « l'avent-ture » de Noël, c'est un chemin de service, un chemin d'humilité, un chemin d'hospitalité sur lequel nous entraîne et nous accompagne ce Fils assis au Jardin des Oliviers, qui s'avance vers sa passion, vers la Croix.

L'Avent, c'est ce temps offert pour trouver le silence intérieur, pour s'asseoir à notre tour au Jardin des Oliviers, et regarder, comme les chrétiens des premiers temps, vers la lumière de Pâques, vers celui qui triomphe dans la lumière, le soleil levant qui nous a visités d'en haut.

Au loin la peur! Au loin l'angoisse! L'Avent nous invite à l'attente vigilante, non de la catastrophe finale, mais d'une Bonne Nouvelle exigeante. Et nous, les condamnés devenus des graciés, nous sommes invités à être désormais non pas le peuple incrédule dans la nuit obscure de Bethléem, ni même les bergers étonnés et béats mais les disciples avertis de ce siècle. Dans notre monde, secoué par les fanatismes religieux et les égoïsmes économiques, séduit par l'aventure périlleuse du nationalisme et du repli identitaire, menacé par les ténèbres de tous ordres, il nous faut attester par nos paroles, nos prières et nos actes que Dieu est vivant et que nous croyons qu'il a pris chair au milieu des hommes, à Noël.

Que ce Temps de l'Avent, votre chemin vers Noël, soit béni et que votre « Avent-ture » avec le Christ vous comble de joie et de paix.

Amen!

Pr Gilles PIVOT