Prédications Protestantes dans les Alpes du sud
Dimanche 23 décembre 2018
Chatillon en Diois (26410)
Lectures du Jour :
Michée 5, 1-5,
Hébreux 10, 5-10,
Luc 1, 26-45
« Dieu nous appelle»
Nous venons de lire le passage traditionnel du quatrième dimanche de l’Avent, qui nous raconte cette histoire qu’on appelle « l’Annonciation »
Vous avez tous, un jour ou l’autre, lu ou entendu cette histoire que l’on peut résumer ainsi :
Un messager de Dieu, un ange nous dit l’évangéliste, qui précise qu’il s’agit de Gabriel : un personnage qui, dans le livre de Daniel, est l’annonciateur du temps du salut – … un ange donc annonce à une jeune fille, Marie, mariée à un certain Joseph, qu’elle va être enceinte et enfanter un fils, auquel elle donnera le nom de Jésus, ce qui veut dire « Dieu sauve ».
Bien sûr, nous connaissons tous ce récit que beaucoup interprètent comme l’annonce d’une naissance miraculeuse. Cette interprétation repose en grande partie sur un problème de traduction : parce que le mot grec « parthenos » (dans la version grecque du N.T. qui est la base que nous utilisons) désigne une jeune fille vierge, alors que le mot hébreu correspondant désigne simplement une jeune fille.
Mais, elle s’appuie aussi, sur ce qu’affirme le messager de Dieu : « l’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre ». Beaucoup ont compris ce verset de façon littérale, comme si l’Esprit saint, était, en quelque sorte, le père biologique de l’enfant.
Or, nous devons réaliser que ce qui est dit ici n’est, en réalité, qu’un conte, écrit 70 ans après les faits, enrichi de citations de l’Ancien Testament. Pour comprendre l’enjeu et la richesse de ce passage du Nouveau Testament, il nous faut dépasser la question du miracle surnaturel.
La vraie question n’est pas de savoir si Marie était ou non vierge ou moment de la conception ou au moment de la naissance de Jésus. Elle n’est pas non plus de savoir qui est le père biologique de l’enfant : l’Esprit saint, Joseph ou quelqu’un d’autre. Ce ne sont que des questions secondaires qui passent à côté des vrais sujets.
Oublions donc tous ces détails, dans ce récit dont l’authenticité est douteuse et intéressons nous aux deux questions importantes qui sont traitées dans ce texte :
Qui est Jésus, d’une part, et d’autre part que se passe-t-il dans le cœur d’un croyant, dont Marie est ici un exemple.
Le premier point important de ce passage concerne l’enfant qui va naître :
Marie doit lui donner le nom de Jésus. Ce nom veut dire « Dieu sauve », et ce n’est pas sans raison. Il a été choisi par le Seigneur Dieu lui-même pour bien faire connaitre, une fois de plus, son projet : sauver l’humanité. Et, pour cela, l’ange explique à Marie qu’il sera grand et sera appelé fils du Très Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; Il règnera pour toujours sur la famille de Jacob et son règne n’aura pas de fin.
Cet enfant, ‘Fils de Dieu’ va répondre aux promesses de Dieu et aux attentes des croyants : Il est le Messie, celui qui a été choisi par Dieu pour manifester son salut aux hommes. Il révèlera et suivra la Parole de Dieu, il sera celui par qui Dieu se révèle, parle et agit.
Mais Marie qui, elle, est sur terre, loin d’être effrayée par l’annonce qui lui est faite, se demande comment cela est matériellement possible puisqu’elle n’a pas encore connu son mari. Et elle n’hésite pas à poser la question : « comment cela se fera-t-il ? ».
Pour lui répondre, le messager emploie une expression typique de l’Ancien Testament: « la puissance du Très Haut te couvrira de son ombre »… une expression qui veut simplement dire que c’est la « présence efficace de Dieu », qui va agir dans le cœur et la vie de Marie, afin qu’elle soit emplie de la lumière de Dieu et que son enfant soit élevé dans la confiance et la fidélité au Seigneur.
Ce qui nous est donc dit d’important dans ce passage biblique, c’est que Dieu va agir et qu’il va manifester la puissance de son amour dans cet enfant qui va naître, qui s’appellera Jésus et qui sera le Messie. Dieu se révèle ainsi comme un Dieu qui est avec nous, qui œuvre en nous et pour nous.
Le deuxième point important concerne Marie, et nous concerne également, car le dialogue entre le messager et Marie met en scène ce qui se joue dans le cœur d’un croyant, dont Marie est un exemple.
Essayez un instant de vous mettre à la place de Marie et de vivre ce qui lui arrive :
Imaginez…
Vous êtes une jeune fille, pleine de projets, vous allez bientôt vivre et vous installer avec votre époux. Et puis, tout à coup, vous vivez une expérience spirituelle inouïe – vous avez une vision : un messager de Dieu se révèle à vous et vous invite à vous réjouir, parce que Dieu est avec vous, parce que vous savez que la faveur et la bienveillance de Dieu vous sont acquises, parce que vous sentez que vous êtes en communion avec Dieu.
Bien sûr, cette expérience spirituelle extraordinaire vous bouscule et vous bouleverse. Mais, voici que ce messager vous rassure et apaise vos craintes. Il vous révèle que Dieu va agir dans votre vie et dans votre famille. Et que l’enfant qui va naître dans votre couple sera le Messie tant attendu des croyants. Il sera le révélateur de l’amour et du salut de Dieu.
Alors, bien évidemment, vous êtes complétement retournée par tout cela : l’expérience spirituelle, l’apparition d’un messager, et maintenant cette nouvelle extraordinaire qui va changer tout le cours de votre vie : Dieu a un projet pour vous ; vous avez une vocation particulière : vous allez accueillir dans votre famille, participer à la naissance et à l’éducation de celui qui sera le Messie de Dieu, le Sauveur des hommes.
Imaginez alors le trouble et le chamboulement dans la vie de Marie !
Bien souvent… en lisant ce texte… nous ne réalisons plus cela :
Tout, dans ce récit, paraît facile, car nous connaissons par cœur cette belle histoire…
Mais nous devons réaliser à quel point cette expérience de foi a dû complétement transformer la vie de Marie. Car, après tout, ce n’est pas forcément de cette façon que cette jeune femme envisageait son avenir. Ce n’est sans doute pas ce qu’elle attendait de son mariage. Elle était tranquille. Elle s’apprêtait vraisemblablement à vivre une vie paisible avec son mari Joseph. Ils avaient sans doute des projets communs.
Mais voilà que Dieu – par son Esprit, par son Souffle – vient bouleverser sa vie, mais aussi la transformer.
Alors, c’est vrai : on ne sait pas si tout ça s’est vraiment passé en détail comme le raconte l’évangéliste Luc. Il n’y a pas eu de témoins oculaires de cette scène, puisque ce dialogue a eu lieu dans l’intimité d’une relation de foi, et puis des anges ou des messagers de Dieu : on en voit pas tous les jours !!
Mais, au-delà des images et des mots, ce qui est raconté ici, c’est le fait que Marie ait vécu une expérience spirituelle inattendue et extraordinaire : une expérience spirituelle susceptible de changer tout le cours de sa vie. Et ce qui est étonnant, c’est sa réponse toute simple, son adhésion : « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu l’as dit ».
Quelle réponse extraordinaire de foi ! Elle dit à Dieu et à son messager : « je vais me rendre prête et disponible. J’accepte ! Je suis prête à te suivre, Seigneur : qu’il soit fait selon ta volonté !
Un appel de Dieu vient retourner la vie de cette jeune femme et, elle, elle dit « oui » tout simplement.
Aurions fait la même réponse ?
Oui… nous devons nous poser cette question. Que ferions-nous si le Saint Esprit venait frapper à notre porte ?
Car, voyez-vous, il me semble que, si ce récit nous est conté par l’évangéliste Luc, c’est pour nous dire le « oui » de Marie… mais c’est également pour nous dire que, nous aussi, nous pouvons être des hommes et des femmes de foi, qui font confiance au Seigneur. C’est pour nous encourager à faire comme cette femme – cette jeune fille – qui accepte la vocation, la mission que Dieu lui confie.
Soyons certains, en effet, que Dieu frappe aussi à la porte de notre cœur. D’une manière ou d’une autre, il est déjà venu frapper à notre porte, que nous en ayons conscience ou non, que nous ayons entendu et accepté son appel, à telle ou telle occasion, ou que nous l’ayons remis à plus tard. Dieu nous fait signe par de nombreux biais et de bien des manières. Il ne cesse de nous attendre et il n’est jamais trop tard pour Dieu.
Alors… accepterions-nous – comme Marie – de nous laisser déplacer par Dieu ? Accepterions-nous de modifier nos projets et nos désirs, comme elle a eu le courage de le faire… simplement en vivant dans la confiance ?
Bien sûr, nous ne verrons peut-être jamais de messager ou d’ange de Dieu, mais soyons certains que Dieu nous parle de bien des manières : par sa Parole, par son Évangile, par des témoins… il nous parle à travers les personnes que nous rencontrons… à travers les événements et les visages que nous croisons… à travers les livres que nous lisons… à travers la nature que nous contemplons : Dieu nous parle et il nous appelle.
Il vient nous dire : « reçois ma confiance et mon Esprit d’amour ! Sois mon témoin ! Ne crains rien ! Si tu accueilles mon Esprit, le Christ peut naître en toi ! »
C’est cela que raconte ce récit de l’avent : une femme, un jour, a accepté d’ouvrir son cœur à Dieu … L’Esprit saint est venu habiter en elle et féconder son existence. Il fait germer la vie. C’est le miracle de la foi.
« Heureux celui qui croit ! Les projets de Dieu s’accompliront, en lui et par lui ».
Amen.
Jean Jacques Veillet